Qualifié sieur de Bertichères, le plus jeune des cinq fils d'Antoine (alors converti au calvinisme) et de Jeanne d'Assy, mariés en 1544, fut élevé dans la maison d'Henri de Navarre et prit part, en 1570, avec son frère Jean, aux guerres de religion en Bourgogne. Il fut attiré dans le Midi et, le 6 septembre 1587, épousa Madeleine Du Pleix, fille d'Antoine, baron de Lecques seigneur de St-Michel, près de Nimes, gouverneur d'Aigues-Mortes. Bertichères prit part avec son beau- père à diverses opérations militaires autour de Nimes, en 1588, et obtint, sur résignation de celui-ci, le 7 septembre 1592, le gouvernement d'Aigues-Mortes.
Dès 1593, il s'établit à St Gilles avec une troupe de Soudards et changea le monastère en forteresse et dévasta son église. Il obtint du roi de Navarre, dit-on, la commande de cette abbaye et y introduisit manu militari, en avril 1595, une de ces créatures, Guillaume Jacquet. JB Séguier, abbé régulièrement élu se fit pourtant installer dans le monastère, mais Bertichère l'en chassa le 28 septembre, et le 16 décembre 1595, obtint des chanoines terrorisés l'élection de Luc Allemand, l'un d'enre eux, auquel il ne laissa que 500 livres de revenu.
Il se réserva le surplus. Bien qu'il soit difficile de rendre un compte exact des faits, il est probable que Bertichères fit peser sur Aigues-mortes, Sommières et Peccais, qui dépendaient de son gouvernement, une semblable tyrannie ; sa gestion des salines de Peccais ne dut pas être sans reproches; d'autre part, on suspecta ses relations avec Montmorency. Le 31 octobre 1597, Henri IV le révoqua, le mandant à la cour, mais Bertichère eut garde de s'y rendre. On dut organiser une expédition militaire contre lui, et, le 16 février 1598, il céda la place. Il obtint toutefois du roi la permission de demeurer à Sommières. Le 8 décembre 1607, Bertichères fit élire abbé de St Gilles un de ses bâtards, Barthélemy de Chaumont, qui avait été élevé dans la religion catholique et ordonné diacre.
En même temps, il intrigua auprès des calvinistes du Bas-Languedoc pour être remis en possession d'Aigues-Mortes, assurant qu'il en avait été chassé en haine de la religion.
Aussitôt alertés, les habitants de la ville déclarèrent, le 29 avril 1612, qu'ils incendieraient leurs maisons et émigreraient plutôt que de supporter la tyrannie d'Abdias.
Celui-ci n'en fut pas moins réintégré dans ses fonctions le 17 août 1612, mais le duc de Rohan s'opposa à son retour, car il le soupçonnait de s'être vendu à la cour.
Bertichères fut révoqué de nouveau le 16 février 1614, Saugeon fut nommé à sa place, mais il le fit arrêter à Villefranche-de-Rouergue.
C'est alors que Bertichères publia son "Discours véritable sur ce qui s'est passé pour le gouvernement d'Aigues-mortes ", en 1615, et il prit les titres de conseiller d'Etat, maréchal de camp, capitaine d'une cinquantaine d' hommes d'armes, de gentilhomme de la chambre.
Ce copieux factum, bourré de pièces justificatives, fut surtout dirigé contre les églises ; toute clarté en est absente. Bertichères revint à St Gilles, dont son bâtard prit possession en 1617; il en fit un lieu de scandale et un repaire de brigands. Le Jeune Barthélemy de Chaumont voulut s'y opposer, mais sont père le fit arrêter et torturer le 01 janvier 1618.
Le parlement de Toulouse, saisi de l'affaire, fit, par arrêt du 30 oct. 1619, mettre l'abbé en liberté et chasser les soldats calvinistes.
Barthélemy fut alors remplacé par un autre bâtard de Bertichères : Jean Picard, alias Galian de Chaumont, qui reçut ses bulles, le 27 janv. 1620. Lorsque le cercle calviniste du Bas-Languedoc eut, le 16 oct. 1621, privé Gaspard de Coligny, comte de Châtillon, de sa charge de général des églises, il en confia la gérance à Bertichères avec mission de chasser Brison de Nimes, ce qui fut fait le 3 déc.
Le duc de Rohan conserva Abdias comme lieutenant mais, comme il s'en défiait, il l'écarta bientôt. Bertichères revint mourir à Sommières le 7 août 1622 à l'âge de 72 ans. Il avait eu cinq filles et un fils, Henri, baron de Lecques .
mém. de Rohan. Ménard, hist. de Nimes. v, 334-390. - Pacotte, Annales d'Aigues-Mortes. - Golffon, S-Gilles,